Elevé au grade de général de brigade de chars à Metz, versé au cadre de réserve (mars 1939) pour cause de limite d'âge, il fut rappelé à l’activité quelques mois plus tard face à l’éminence de la guerre. Commandant les chars de combat de la VIIe Armée puis, le Groupement Cuirassé, avec lequel il couvrit le repli de deux armées en réduisant la poche d'Abbeville, tout au long de la retraite, il refusa la défaite puis l’armistice. Démobilisé, résolument opposé au nazisme, dès juillet 1940, il entrait en résistance.
En août 1942, sur proposition de Jean Moulin, De Gaulle le choisit pour organiser et commander l'Armée secrète qui devait regrouper différents mouvements de la Résistance en zone Sud : Combat, Libération-Sud et Franc-Tireur. Delestraint accepta et prit le pseudonyme de « Vidal ». Entré dans la clandestinité, il s’installa à Lyon où il établit son état-major.
En février 1943, présent à Londres avec Jean Moulin afin de coordonner l’action de l’Armée secrète avec celle du commandement des Alliés, il vit ses attributions s’étendre désormais à l’ensemble du territoire et apprit que le débarquement tant espéré n’aurait pas lieu avant le printemps 1944.
Pendant les mois d’attente, il convenait d’organiser, d'équiper et de former les hommes en vue du grand jour. Malgré les pièges tendus et tous les dangers, il travailla sans relâche à l’unification et à la cohésion opérationnelles de ses troupes.
Mais la surveillance allemande s’intensifiait, les arrestations se multipliaient. Delestraint-Vidal n’était pas sans savoir que le temps lui était peut-être compté. Il avait raison.
Le 9 juin 1943, il fut arrêté à Paris, alors qu’il devait rencontrer les chefs militaires des mouvements de la zone nord, ainsi que Joseph Gastaldo, chef du 2ème bureau et de son état-major, et Jean-Louis Théobald, collaborateur de Jean Moulin.
Après plus de cinquante heures d'interrogatoire ininterrompu par la Gestapo, durant lesquelles il ne donna aucune information, il fut transféré à la maison d'arrêt de Fresnes où il s’efforça de dégager la responsabilité et d’obtenir leur relaxe en prenant tout à sa charge.
Après neuf mois d’instruction, l’affaire fut renvoyée devant le tribunal de Breslau. En attendant sa comparution, en application du décret Nacht und Nebel, il fut déporté au camp de concentration de Natzwiller-Struthof en Alsace.
En septembre 1944, devant l’avance des Alliés, le camp fut évacué et les prisonniers déplacés au camp de concentration de Dachau où il fut abattu d'une balle dans la nuque le 19 avril 1945, quelques jours avant l'arrivée des Alliés.
Les circonstances de son assassinat ne furent d’abord divulguées que par les témoignages de déportés français dont aucun ne fut en fait témoin visuel de l’exécution. Mais à leur retour en France, ils rapportèrent les différentes versions qui avaient circulé dans le camp en y ajoutant une touche personnelle souvent affective. Un fait était au moins certain : sa dépouille avait disparu dans un four crématoire.
Il fallut attendre le procès de Dachau, qui se déroula dans l’enceinte du camp de mars à août 1946, pour que soit évoqué ce crime avec plus de rigueur après enquête.
Alors qu’il servait la messe de l’évêque de Clermont, Mgr Piquet, dans le block 26, sur ordre, un S.S. vint le chercher et l’informa que, libéré, il faisait partie d’un convoi en partance. De ce fait, il devait se préparer. Accompagné cette fois de deux S.S., il se rendit à l’Ehrenbunker pour y faire sa valise et se changer. Il retourna au block 26, y reçut la communion et repartit à l’Ehrenbunker où Ruppert, un subalterne de Shäfer (lieutenant-colonnel du camp), l’attendait. Conduit au bâtiment administratif pour remplir soi-disant les documents de son élargissement, il sortit ensuite du camp pour être abattu après quelques pas. On ne saura jamais s'il crut vraiment au stratagème ou s'il fut conscient de sa fin.
Depuis le début, Shäfer avait reçu l’ordre de Berlin, probablement de Kaltenbrunner, de le faire disparaître. Pour cause d’élimination de ceux qui y travaillaient, les témoignages provenant du crématorium sont rares. Mais grâce à ceux, tous concordants, des détenus allemands qui formaient le commando du crématorium de Dachau, et présents ce 19 avril, la vérité put enfin voir le jour.
Nommé Compagnon de la Libération à titre posthume, à défaut de tombe où honorer sa mémoire, le nom du général Charles Delestraint fit son entrée officielle au Panthéon le 10 novembre 1989.