Lorsqu’arriva la Révolution, l’Eglise de France, toute puissante, avait besoin de réformes. Le bas-clergé souhaitait d’une part, une répartition plus équitable des revenus ecclésiastiques et, d’autre part, que l’accès au haut-clergé cessât d’être réservé à la noblesse.
Pour y remédier, en juillet 1790, l’Assemblée Constituante vota la Constitution Civile du clergé : prêtres et évêques devenaient des fonctionnaires élus et rétribués par l’Etat.
En attendant la réponse du pape qui tardait à venir, Louis XVI la ratifia en décembre. La moitié du clergé séculier prêta serment à la constitution : on les nomma les « jureurs » ou les « assermentés ». Quant à ceux qui la refusèrent, les « réfractaires », ils furent démis de leurs fonctions, se retrouvèrent sans ressources et clandestins.
Au printemps 1791, le pape ayant signifié son désaccord, des jureurs rejoignirent les rangs des réfractaires. Toutefois, grâce à son droit de veto qu’il avait encore, le roi pouvait encore les protéger.
Mais après la chute de la monarchie le 10 août 1792, la Commune de Paris prit le pouvoir et voulut neutraliser les individus soupçonnés de compromettre le salut public ; dès le 11, elle fit procéder à l’arrestation de tous les prêtres réfractaires. Le couvent des Carmes devint l’une des prisons où ils furent détenus.
Parmi les 48 sections composant la division administrative de Paris, celle du Luxembourg, dont dépendaient dorénavant les Carmes, était particulièrement virulente.
D’une façon plus générale, les massacres de Septembre se préparaient. A la Législative, Tallien. transmit la volonté de la Commune : purger la nation des prêtres perturbateurs. Aux Carmes, ceux qui persévéraient à ne pas jurer sur la Constitution Civile du Clergé, ne se faisaient guère d’illusions.
Le massacre
Le 2 septembre, à quatre heures, ordre fut donné de se rendre au jardin, y compris les vieillards et les infirmes. Et soudain, Maillard, sinistrement célèbre comme chef des massacreurs de la prison de l’Abbaye, surgit à la tête de sa troupe de forcenés au cri de : « Mort aux réfractaires ! » Les premières victimes tombèrent sous leurs coups de sabres, dont Mgr du Lau. Ceux qui tentèrent de s’échapper furent rattrapés sans pitié.
On regroupa les survivants dans l’église, qui se réfugièrent dans le chœur, avant de les refaire sortir deux par deux. Après s’être assuré qu’ils refusaient toujours de prêter serment, ils prenaient le corridor qui les menait au petit escalier d’accès au jardin au pied duquel ils furent tous massacrés.
En moins de deux heures, cent dix victimes périrent ainsi formant un tas de cadavres qu’on dépouilla. Au total : cent quinze martyrs.
Une trentaine d’entre eux furent jetés dans une fosse commune de l’ancien cimetière de Vaugirard (disparu), et les autres dans un puits du jardin des du couvent.