Trois ans plus tard, folle de chagrin, elle menait son mari à la tombe et devenait régente en attendant la majorité de Louis IX.
Bien que son mari lui ait laissé un pouvoir fort, Blanche, clef de voûte de l’édifice royal, devint l’objet d’attaques et de méfiance tandis qu’une opposition voyait le jour. Les représentants de la moyenne noblesse, jusque là fidèles se préparaient à faire cause commune avec les grands vassaux de l’Île de France. La rébellion n’aboutit pas. Mais face à d’autres soulèvements, ses conseillers, la pensant peut-être plus impulsive que sage, lui retirèrent peu à peu de ses pouvoirs.
Louis IX atteignit sa majorité. Près de lui, Blanche joua un rôle de conseillère privilégiée et exclusive. Le jeune roi se libéra un peu, mais au moindre problème de santé, qu’il a fragile, sa mère revenait sur le devant de la scène.
Alors qu’elle était à son apogée, Louis IX épousa Marguerite de Provence. Malgré ses efforts pour étouffer ses réticences, Blanche ne supportait pas sa belle-fille et se transforma en une caricature de belle-mère, pourchassant les jeunes tourtereaux dans le moindre recoin les rappelant à l’ordre au plus petit geste amoureux. Veuve de bonne heure, elle avait reporté toute son affection et son influence politique sur son rejeton de roi très épris de sa femme éclatante de beauté et de gaité et de plus en plus cultivée ! Et ce couple qui s’entendait à merveille !
Trop pour Blanche ravagée de jalousie. Blanche qui résistait, profitant de toutes les occasions pour empêcher le développement d’un contre-pouvoir opposé au sien.
Les hostilités officielles avaient éclaté en 1241 et prirent de l’ampleur l’année suivante lors de la naissance d’une seconde fille. Pas capable de faire un mâle la belle-fille ?
Malgré ses difficultés à consolider son règne personnel à cause de sa santé, Louis y parvint. Blanche dut quitter le palais royal et fut écartée de toute décision politique.
Le départ de Louis IX à la croisade, accompagné de sa femme, remit Blanche aux affaires avec une légère restriction : il lui confia le gouvernement mais pas le sceau royal lui interdisant toute décision importante. Elle assura l’intendance de l’expédition de son fils, fit face à la croisade des pastoureaux, prit la défense d’une ligue paysanne, etc.
Usée, l’annonce de la captivité de Louis participa sans doute à l’affaiblir davantage même si elle le fit libérer. Blanche sentait sa fin venir. Ses médecins lui conseillèrent de quitter Paris. Elle s’installa à Melun.
Malade, elle fit venir l’abbesse de Maubuisson afin d’exhausser son vœu de rentrer dans l’ordre cistercien. Quelques jours avant sa mort, elle en reçut l’habit et, par humilité, échangea son lit contre une paillasse au sol.
En grande pompe, on ramena sa dépouille jusque Paris puis à Maubuisson qu’elle avait fondée et où elle avait depuis longtemps élu sa sépulture.
En mars 1253, son cœur fut solennellement apporté en l’abbaye Notre-Dame-des-Lys qu’elle avait aussi fondée près de Melun.
Lorsque la nouvelle parvint à Louis IX, toujours en croisade, il fut accablé de douleur.
Blanche de Castille fut inhumée au centre du chœur des religieuses de l’abbatiale. Sur son magnifique tombeau en cuivre doré et argent, son gisant la représentait en habit de moniale.
Profané à la Révolution, il fut fondu le 10 novembre 1792 sans qu’on sache précisément ce qu’il advint des ossements.