Philippe ne s’embarrassa pas longtemps la conscience. Prétextant un doute de filiation compte tenu du passé adultérin de sa mère, on déterra les vieux codes des Francs Saliens dont les juristes détournèrent le sens d’origine d’articles concernant les droits des femmes à hériter de terres. Ainsi le « femme ne peut servir de pont et de planche » régissant de simples contrats de droit privé fut-il transformé en une interdiction absolue pour les femmes de ceindre et par conséquent de transmettre la couronne de
France !
Déjà évincée du trône, ses oncles Philippe V puis Charles IV firent en sorte, contre compensation financière, de la priver de ses droits à la Champagne et à la Navarre.
Ce ne fut qu’à la mort, sans héritiers mâles, de ces deux Capétiens directs que Jeanne put enfin porter réclamation pour la couronne de Navarre auprès du nouveau roi Philippe VI. Contrairement à ses cousins défunts, Philippe VI de Valois, lui, n’était pas un descendant direct d’Henri Ier de Navarre alors que Jeanne en était l’arrière-petite-fille. Ne pouvant se prévaloir de sa légitimité, il négocia. Ainsi en 1328, Jeanne spoliée depuis des années devint-elle reine de Navarre sous le nom de Jeanne II.
Après son mariage avec Philippe III, comte d’Evreux, elle enfanta le futur Charles le Mauvais ; Blanche, qui fut la seconde épouse de Philippe VI, et Agnès la future épouse du fameux Gaston Phébus.
Jeanne était en son château de Conflans quand elle mourut victime de la peste qui depuis plusieurs mois ravageait la France. En cette période d’épidémie, le transport du corps s’avéra difficile.
Guère pleurée, elle fut inhumée en la basilique Saint-Denis au milieu des rois de France, aux pieds de son père. Ainsi, Jeanne privée de sa place de son vivant la retrouvait-elle pour l’éternité.
Elle ne fut pas inhumée dans un caveau mais dans un tombeau de pierre tapissé de plomb dans lequel on trouva une couronne de cuivre doré lors de son ouverture le 18 octobre 1793.
Jetés dans une fosse commune ses restes furent déposés dans l’ossuaire de la basilique en 1817.
Son gisant en marbre, conservé au Musée des Monuments français, fut replacé près aux pieds de celui de son père et à côté de celui de son demi-frère. Couvrant le front et le menton, le voile traditionnel des veuves lui encadre le visage. Certains éléments laissent à penser que la couronne et le cordon du manteau étaient en métal, cuivre émaillé ? Son sceptre a disparu.
Son cœur, fut inhumé au couvent des Jacobins de la rue Saint-Jacques auprès de celui de son époux. Un élément ornant son carditaphe est conservé au musée du Louvre.