Perpétuelle mouche du coche de Richelieu, « nul ne sut porter à un si haut degré qu’elle l’art d’imaginer des complications, de les étendre, des les enchevêtrer, de les rendre redoutables… », d’autant plus redoutables qu’elle déclencha de nombreuses passions parmi la noblesse et les puissants y compris ses maris le connétable de Luynes et Claude de Lorraine, duc de Chevreuse.
A son actif, et parmi d’autres, elle fut mêlée à l’affaire Buckingham, à la conspiration de Chalais, à celle du comte de Soissons, à la cabale des Importants contre Mazarin, etc. Chassée plusieurs fois de la Cour, elle y revint toujours. Cheville ouvrière du complot de Chalais, elle avait évité un jugement mais avait été exilée dans le Poitou. Furieuse, elle traita alors le roi « d’idiot et d’incapable » et Richelieu de « faquin » puis se réfugia en Lorraine.
Bien qu’ayant enterré Richelieu puis Louis XIII, elle ne désarma pas pour autant. Anne d’Autriche, devenue régente et soutenue par Mazarin, la duchesse perdit son pouvoir. Inacceptable pour cette féroce comploteuse toujours en but à maintenir la fortune de sa famille. Elle débuta donc le règne de Louis XIV à la tête de La Fronde dont le jeune roi sortit vainqueur. A partir de cet instant, les princes apprirent à marcher droit.
Comme on ne peut refaire sa nature, la duchesse persévéra dans ses intrigues d’intérêts, mais de façon plus pacifique en cherchant à unir aux siens les meilleurs partis.
Ce n’est qu’à partir de 1674 que Marie de Rohan décida de se retirer du jeu. Elle choisit alors le prieuré bénédictin de Saint-Fiacre, dit aussi de Maison-Rouge, à Gagny, alors désaffecté. Elle y finit ses jours dans la quiétude, loin de ses tumultes passés de la cour.
A sa demande, elle fut inhumée simplement, non pas dans le prieuré comme on le voit écrit communément, mais dans l’église de Gagny construite au 11ème siècle et détruite en 1839. Cette église, déjà sous le vocable de Saint-Germain, se situait au même endroit que l’actuelle édifice. Elle abrita longtemps un cimetière, lequel se situait dans la cour d’entrée, près du presbytère.
Marie de Rohan fut ensevelie dans l’aile méridionale située près de la chapelle de la vierge où l’on pouvait lire sur un marbre noir l’épitaphe suivante :
« Cy-gist Marie de Rohan, Duchesse de Chevreuse, fille d’Hercule de Rohan, Duc de Montbason. Elle avait épousé en premières noces Charles d’Albert, Duc de Luynes, Pair et Connestable de France, et en secondes noces Claude de Lorraine, Duc de Chevreuse. L’humilité ayant fait mourir depuis long-tems en son cœur toute la grandeur du siècle, elle défendit que l’on fît revivre à sa mort la moindre marque de cette grandeur qu’elle voulut achever d’ensevelir sous la simplicité de cette tombe, ayant ordonné qu’on l’enterrast dans la paroisse de Gagny où elle est morte à l’âge de 79 ans le 12 aoust 1679. »
Monsieur l’Abbé Chastelain, en passant à Gagny, commenta ainsi l’épitaphe : « On y voit l’épitaphe de Madame de Chevreuse si célèbre dans l’Histoire de la guerre de Paris, qui commença en 1618 ; elle n’y est nommée ni princesse ni même très-haute et très-puissante Dame, ni son mari très-haut et très-puissant Prince. Elle mourut sur cette Paroisse au Prieuré de Saint-Fiacre de la Maison Rouge. »
Cette épitaphe est révélatrice de l’état d’esprit chez ce trublion enjuponné en sa fin de vie :
« L’humilité ayant fait mourir depuis longtemps dans son cœur toute la grandeur du siècle, elle défendit que l’on fit revivre à sa mort la moindre marque de cette grandeur qu’elle voulut achever d’ensevelir sous la simplicité de cette tombe ».
Pendant la Révolution, l’église fut saccagée, le cimetière pillé et les restes de la duchesse de Chevreuse mélangés avec d’autres ossements issus du cimetière. Une fosse commune fut, semble-t-il, creusée pour les recevoir. Bien que fort probable, aucun document ne permet de le confirmer. Ses restes n’ont jamais été retrouvés.
Quant à sa pierre tumulaire, volée pendant la Révolution, on la découvrit vers 1880 servant de seuil à une maison située à Montfermeil à proximité de Gagny. Après concertation entre la commune de Gagny et le particulier, la pierre fut offerte au duc de Luynes qui la plaça dans la galerie historique du château de Dampierre (Yvelines) dont la duchesse fit don à son fils en 1663. Ainsi, Marie de Rohan, duchesse de Chevreuse reposait-t-elle symboliquement auprès de son mari. Y est-elle encore ? J'ai transmis cette question à la famille et attends la réponse.