Etonnant paradoxe que le règne de Philippe Ier qui fut le plus long de la dynastie capétienne en étant le moins important alors que, dans le même temps, naissait un rayonnement culturel qui mit la France médiévale à la tête des Arts et des Lettres.
Philippe n’était pas le moins doué de cette dynastie, mais le moins dévoué aux affaires de l’état. : le plus fantasque, le plus indolent et le plus indifférent au bien public.
A sa décharge, couronné à Reims le 23 mai 1059 du vivant de son père, il ne régna seul qu’à partir de 1066 et exerça son autorité dans le chaos féodal auquel son père n’avait pu mettre un terme.
Il fut le roi qui convenait à une noblesse sans culte de l’honneur et du devoir et à un clergé dont trop de membres étaient intéressés cupide et arrivistes.
Alors qu’il lui fallait assurer une base réelle à la puissance royale en consolidant le domaine et contenir de trop puissants vassaux, il perdit la Normandie face à son plus redoutable vassal : Guillaume le Conquérant, devenu roi d’Angleterre en 1066.
Peut-être eût-il gagné en sagesse s’il n’avait pas cédé à une folle passion pour une femme intrigante.
Marié à Berthe de Hollande depuis vingt ans, il se lassa de son épouse qu’ il répudia pour convoler peu après avec Bertrade de Montfort, elle-même mariée à Foulques IV d’Anjou, un puissant et remuant vassal.
Le couple se retrouvant bigame chacun de leur côté, la papauté réagit de façon virulente. Le pontife en profita pour lui faire rendre compte de ses exactions contre les biens de l’église et l’excommunia l’empêchant de participer à la 1ère croisade (1096-1099) prêchée par Urbain II. Là où il aurait pu fédérer les forces vives de son royaume, il dut laisser le commandement des armées à ses feudataires dont le plus célèbres : Godefroy de Bouillon. Ainsi provoqua-t-il leur morcellement au lieu de les rassembler.
Après avoir longtemps résisté à la volonté papale, Philippe accepta de faire amende honorable pour obtenir l’absolution mais passa outre l’interdiction de revoir sa bien-aimée avec laquelle il continua à vivre jusqu’à sa mort. En se maintenant en adversaire de la papauté il manqua de réaliser l’unité et la réforme de son clergé.
A la mort de Berthe de Hollande en 1094, il obtint même que les enfants nés de Bertrade soient légitimés.
Heureusement, s’il s’abstenait de gouverner, l’histoire continuait sans lui. Des évènements, dont il ne fut pas le maître, apportèrent à la France des fiefs au domaine le Gâtinais (1069), le Vexin (1077) et le comté de Bourges (1099).
Malgré lui, la noblesse française, soulevée par sa foi et sa vaillance vainquit les armées turques, s’empara de la Palestine, de la moitié de la Syrie et établit un royaume franc en Orient.
Ce furent ces forces spirituelles qui, provoquant un élan religieux et culturel, mirent la France à la tête des grandes fondations monastiques, du progrès économique et de la floraison des Arts et des Lettres pour quatre siècles.
Adipeux, glouton, eczémateux, sujet à des névralgies sans doute dues à des caries, Philippe Ier quitta ce monde au château de Melun-sur-Seine.
Ne voulant pas être inhumé auprès de ses ancêtres, dont il se sentait indigne, il renonça aux fastes de la basilique Saint-Denis pour l’abbatiale bénédictine de Saint-Benoît où il fut enseveli entre le choeur et le maître d’autel. Son fils, Louis VI, associé au trône, lui avait organisé de magnifiques funérailles.
Epargnée lors des profanations révolutionnaires, sa tombe est l’une des rares sépultures royales qui nous soit parvenue quasi intacte, tout du moins avec des restes conservés.
Redécouverte au mois de juillet 1830, on l’ouvrit une première fois puis une seconde fois deux semaines plus tard en attendant une véritable étude archéologique qui se fit en 1958 en particulier sur la dépouille et les vestiges qui lui étaient associés.